« La vie est une mauvaise photographie » Les Chambres, poème du temps qui ne passe pas,1969, Louis Aragon
Tirages argentiques sur papier rare réalisés en 2007
Cinquante filles, mais qui sont-elles exactement ?
Un groupe de révolutionnaires armées de bombe-chewing-gum ? Les dernières créatures artificielles de la société du spectacle ? Des zombies nomades de l’ego ? Des mythomanes qui veulent se faire passer pour des petites filles, ou des petites filles vieillies prématurément ? S’agit-il de machines à fabriquer des clichés, de jeunes filles en quête identitaire, de suicidaires, ou de fans de Sue Lyon ? Elles ont vingt ans et un peu plus. Prises entre l’insouciance, les rêves, les contraintes biologiques et sociales, elles doivent devenir des adultes. Elles entrent dans le monde. Elles y cherchent une place. Elles occupent aussi un nouveau corps. De nouvelles formes qu’elles n’ont pas choisies. C’est à cette période de ma vie que je prends mes premières photographies. Je me demande : Sommes-nous une succession de formes physiques ? Sans existence réelle ? Une enveloppe aussi vide qu’une image de magazine ? Une bulle de chewing-gum ? Alors, à la façon d’un travail documentaire, je me suis tournée vers d’autres filles de mon âge. Vivaient-elles comme moi toutes ces incertitudes ? Voyaient-elles la vie comme une mauvaise photographie ? Et comment se possitionneraient-elles à l’intérieur du cadre de mon questionnement ? Ces filles, je les ai rencontrées au hasard de la vie. Je ne les ai pas choisies. Certaines m’ont appelée sans que je ne les connaisse, d’autres sont mes meilleures amies. Parfois, je les ai abordées dans des cafés, dans des soirées, ou à la fac. Parfois, elles m’ont abordée spontanément, comme pressées d’être devant l’objectif. Au fond, sans nous chercher vraiment, nous nous sommes trouvées.
Le jeu était ouvert à toutes, il suffisait d’en accepter la règle. Vous avez envie d’exploser. Vous viendrez chez moi. Sans trop vous maquiller. Vous vous poserez devant un fond blanc. Dans les limites d’un cadre étroit. Que j’aurais défini. Une fois pour toutes. Vous vous montrerez nues, de la manière la plus simple possible. Vous abandonnerez toute volonté de correspondre aux clichés de la beauté. Le temps de chaque composition. Vous accepterez l’immobilité. Vous regarderez l’objectif. Vous ferez une bulle de chewing-gum. Je vous photographierai.
Cette expérience ne pourra aboutir que si elle vous amuse. L’ironie a fait qu’à travers cette étude, ces après-midi entières de discussion, après avoir cherché, organisé, pratiqué l’expérience, les questions sont restées entières. Enfermées à jamais dans les bulles de chewing-gum ? Ensemble, nous avons ri. A l’heure des manifestes, nous nous retrouvions face à une immense interrogation. Se passera-t-il quelque chose un jour ? Ou resterons-nous à tout jamais enfermées dans cette mauvaise photographie ? Assisterez-vous à leur métamorphose ? Est-ce que les bulles de chewing-gum les recouvriront entièrement jusqu’à les faire disparaître ? Est-ce que les filles exploseront lorsque les bulles éclateront ? Ou est-ce que ces explosions provoqueront notre fin à tous ?
48 tirages sur papier baryté tons chauds
Les 50 images de l’exposition, prises en 2008, ont été réalisées en argentique, 35mm. Elles ont été exposées pour la première fois à l’Espace Mycroft par Etienne Dodet (paris 11e), puis par le Centre LGBT (paris 3e), la Galerie Laure Roynette (paris 3e).
Elles ont notamment été publiées dans les revues : Blink (Corée du Sud), Wienerin Magazine (Autriche), Lamono Magazine (Espagne).
Chacune fait l’objet d’un tirage en huit exemplaires, dans les formats : 60×90 cm, 40×50 cm, 10×15 cm, sous agrandisseur et sur un papier rare texturé et coloré.
Fifty girls. Who are they exactly? A group of revolutionaries, whose weapon would be a bubble gum bomb? The last artificial creatures of the society of spectacle ? Ego nomad zombies? Mythomaniacs pretending to be little girls, prematurely aged little girls? Are they cliché making machines, young girls searching for their identity, suicidals, or Sue Lyon’s fans?
The 50 pictures of the exhibition, taken in 2008, were produced on film, 35mm. They were exhibited for the first time at Espace Mycroft by Etienne Dodet (paris 11th), then by the LGBT Center (paris 3rd), and Galerie Laure Roynette (paris 3rd). They have been published in journals: Blink (South Korea), Wienerin Magazine
(Austria), Lamono Magazine (Spain). Each is printed in eight copies, in the size: 60×90 cm, 40×50 cm, 10×15 cm, under enlarger and on a rare textured and colored paper.